Contrôle du magnétisme bidimensionnel par l’ingénierie structurale et chimique d’interfaces van der Waals

Grâce à leurs liaisons faibles de type van der Waals, les matériaux 2D présentent des interactions interfaciales hautement modulables, ce qui permet notamment d’influencer l'ordre magnétique dans les aimants 2D. En particulier, la séquence d'empilement et la chimie interne impactent l'ordre ferromagnétique (FM) ou antiferromagnétique (AFM), comme rapporté récemment dans CrBr3, CrI3 et Fe5GeTe2, où le dopage par Co augmente la température de Curie et modifie les phases magnétiques. Le désordre chimique affecte également les propriétés magnétiques, la substitution Mn/Sb favorisant par exemple l'ordre FM dans Mn(Bi,Sb)2Te4. Cependant, notre compréhension du lien entre la structure atomique de ces matériaux et leurs propriétés magnétiques macroscopiques reste très limitée, notamment en raison de la coexistence de configurations métastables dans un même matériau. Un contrôle précis de l'empilement et de l'ordre chimique est nécessaire pour exploiter les propriétés magnétiques et quantiques de ces nouveaux matériaux 2D. La microscopie électronique à transmission (MET), en particulier le STEM avec correction des aberrations, est aujourd'hui l'une des techniques les plus puissantes, permettant l'imagerie et la spectroscopie à l'échelle atomique, pour étudier les propriétés structurales et chimiques des matériaux 2D. Ce projet de doctorat vise à étudier la relation entre la structure atomique, la chimie et les propriétés magnétiques dans des couches épitaxiales 2D telles que (Fe,Co)5GeTe2, en combinant la croissance par épitaxie par jets moléculaires (MBE) avec une analyse structurale et chimique par STEM.

Mise en oeuvre d'une électronique d’acquisition et de traitement continu programmable à des températures cryogéniques

Le sujet de thèse que nous proposons a pour objet de démontrer qu’il est possible d’intégrer à des températures
cryogéniques l’intégralité de la chaîne d’instrumentation permettant de lire et de piloter les composants quantiques, comme
des qubits. En d’autres termes, nous cherchons à placer in-situ, dans le cryostat et au plus près des composants quantiques
(qubits) l’intégralité des systèmes, qui sont aujourd’hui placés à l’extérieur. De plus, afin de réaliser une avancée majeure,
nous visons une chaîne hyperfréquence (> 2 GHz) entièrement programmable. Ce dernier faut l’objet d’une thèse en cours
financée par l’Agence Innovation Défense (AID) et le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) et d’un dépôt de projet de
type RAPID.

Dans le cadre de ce sujet de thèse, nous commencerons à quelques centaines de MHz. Plusieurs problèmes
principaux sont identifiés et sont à résoudre, parmi lesquels nous citerons :
— conception et intégration de chiplets en System-in-Packages (SiPs) compatibles avec les températures cryogéniques ;
— interfaçage et intégration dans le cryostat des composants Analog to Digital Converter (ADC), Digital to Analog
Converter (DAC) et processeurs de traitement ;
— gérer le débit de données élevés (plusieurs dizaines de Gbit/s par qubit) ;
— latence roundtrip maximum de 200 ns ;
— gestion de l’énergie (quelques dizaines de mW de budget par qubit) ;
— choix des étages cryogéniques adaptés au différents étages de traitements ;
— choix de technologies indépendantes de la nature des objets quantiques manipulés.

Synthèses innovantes de perovzalates et rationalisation du mécanisme de formation par méthodes de synchrotron

Les « perovzalates » sont une nouvelle famille de perovskites hybrides à base d’oxalate, avec une dizaine d’exemples répertoriés depuis 2019 (AILi3MII(C2O4)3 , avec A = K+, Rb+, Cs+, NH4+; M = Fe2+, Co2+, Ni2+). Tout comme les perovskites conventionnelles, elles sont potentiellement intéressantes pour d’innombrables applications (catalyse, optique, solaire etc.), en présentant des avantages supplémentaires liés à l’anion oxalate, qui permet d’incorporer des cations plus volumineux que dans les autres pervovskites hybrides, tout en préservant un structure cristalline semblable aux perovskites d’oxyde.

Cependant, cette classe de nouveaux matériaux est encore à peine explorée, et les synthèses loin d’être maitrisées : les quelques rapports à ce jour produisent systématiquement des mélanges de phases, et portent sur des monocristaux prélevés dans les solutions hétérogènes. Dans ce contexte, la problématique majeure est d’arriver à synthétiser une classe étendue de perovzalates pures.

Cette thèse relève ce défi en exploitant une propriété découverte au laboratoire : la cristallisation des oxalates de métaux par coprécipitation dans l’eau passe par des « émulsions minérales » transitoires, c’est-à-dire des nano-gouttelettes riches en réactifs qui se séparent de l’eau. L’originalité de ce sujet de thèse est d’exploiter la nanostructuration apportée par ces émulsions minérales, et de tester notamment à l’aide de techniques nanotomographiques accessibles en synchrotron si elles permettent de confiner les cations jusqu’à la cristallisation.

Optimisation de la couche catalytique pour l’électroréduction du CO2 intégrée dans un électrolyseur PEM

Ce projet de thèse porte sur l'optimisation de la couche catalytique pour l’électroréduction du CO2 en milieu acide, intégrée dans un électrolyseur à membrane échangeuse de protons (PEM). L’enjeu est de valoriser le CO2 en le convertissant en produits chimiques d’intérêt tel que le monoxyde de carbone. Le milieu acide, inhérent aux électrolyseurs PEM, permet de limiter la formation de carbonates, ce qui améliore l'efficacité de conversion du CO2. Cependant, la réduction du CO2 en milieu acide entre en compétition avec la réaction d’évolution de l’hydrogène, ce qui réduit la sélectivité des produits d’électroréduction. Ce travail vise à développer des catalyseurs sans métaux nobles, inspirés de ceux utilisés pour la réduction de l'oxygène dans les piles à combustible, à améliorer les propriétés des supports carbonés, et à optimiser la mise en forme de la couche catalytique, notamment l’épaisseur, la porosité et l’hydrophobicité, afin de maximiser la conversion du CO2 en molécules d'intérêt. Finalement, la couche active sera intégrée dans un électrolyseur PEM de 16 cm² pour évaluer les performances globales et comprendre les mécanismes mis-en-jeu par des caractérisations électrochimiques.

Nanotubes d'aluminosilicate fonctionnalisés pour la photocatalyse

L'augmentation de la demande en énergie et la nécessité de réduire l’utilisation des combustibles fossiles afin de limiter le réchauffement climatique ont ouvert la voie à un besoin urgent de technologies de collecte d'énergie propre. Une solution intéressante consiste à utiliser l'énergie solaire pour produire des carburants. Ainsi, les matériaux bon marché tels que les semi-conducteurs ont fait l'objet de nombreuses études pour les réactions photocatalytiques. Parmi eux, les nanostructures 1D sont prometteuses en raison de leurs propriétés intéressantes (surfaces spécifiques élevées et accessibles, environnements confinés, transport d'électrons sur de longues distances et séparation des charges facilitées) L'imogolite, une argile naturelle sous la forme d'un nanotubes creux, appartient à cette catégorie. Sa particularité ne vient pas de composition chimique (Al, O et Si) mais de sa courbure intrinsèque qui induit une polarisation permanente de la paroi séparant efficacement les charges photo-induites. Plusieurs modifications de ces matériaux sont possibles (couplage avec des nanoparticules métalliques, fonctionnalisation de la cavité interne), ce qui permet de moduler leurs propriétés. Nous avons fait la preuve de concept que cette argile est un nanoréacteur pour des réactions photocatalytiques (production de H2 et réduction du CO2) sous illumination UV. Afin d'obtenir un photocatalyseur utile, il est nécessaire d'étendre la collecte des photons dans le domaine du visible. Une stratégie envisagée consiste à encapsuler et à greffer de façon covalente des colorants servant d'antenne dans la cavité. L'objectif de cette thèse consiste à synthétiser des imogolites avec différentes fonctionnalisations internes, à étudier l'encapsulation et le greffage de colorants dans la cavité de ces imogolites fonctionnalisées et enfin à étudier les propriétés photocatylitques.

Réactions nucléaires induites par des anti-ions légers – apport du modèle INCL

L’interaction d’une antiparticule avec un noyau atomique est un type de réaction qu’il faut savoir simuler pour pouvoir répondre à des questions fondamentales. On peut citer comme exemples, la collaboration PANDA (FAIR) avec des faisceaux d’antiproton de l’ordre du GeV qui envisage l’étude des interactions nucléon-hypéron, ainsi que celle de la peau de neutron, par la production d’hypérons et d’antihypérons. Cette même peau de neutron est aussi étudiée avec des antiprotons au repos avec l’expérience PUMA (AD - Cern). Au même endroit nous collaborons avec l’expérience ASACUSA pour l’étude de la production des particules chargées. Pour répondre à ces études, notre code de réactions nucléaires INCL a été étendu aux antiprotons (thèse D. Zharenov soutenue fin 2023). Au-delà de l’antiproton il y a les antideutérons et antiHe-3. Ces antiparticules sont d’un intérêt plus récent, avec notamment l'expérience GAPS (General AntiParticle Spectrometer) qui vise à mesurer les flux de ces particules dans le rayonnement cosmique. L’idée est de mettre en évidence la matière noire, dont ces particules seraient des produits de décroissance, et dont la quantité mesurée doit ressortir plus facilement du bruit de fond astrophysique que dans le cas des antiprotons. Le sujet proposé est donc l’implantation des anti-noyaux légers dans INCL avec comparaisons à des données expérimentales.

Chimie de déséquilibre des atmosphères d'exoplanètes à haute métallicité à l'époque du JWST

En un peu plus de deux ans d'exploitation scientifique, le JWST a révolutionné notre compréhension des exoplanètes et de leurs atmosphères. La mission spatiale ARIEL, qui sera lancée en 2029, contribuera bientôt à cette révolution. L'une des principales découvertes rendues possibles par la qualité exceptionnelle des données du JWST est que les atmosphères des exoplanètes sont en déséquilibre chimique. Un traitement complet du déséquilibre est complexe, en particulier lorsque les atmosphères sont riches en métaux, c'est-à-dire lorsqu'elles contiennent en abondance significative des éléments autres que l'hydrogène et l'hélium. Dans un premier temps, notre projet étudiera numériquement l'étendue du déséquilibre chimique dans les atmosphères des cibles du JWST suspectées d'avoir des atmosphères riches en métaux. Nous utiliserons à cette fin un modèle photochimique interne. Dans un deuxième temps, notre projet explorera l'effet de la chimie super-thermique comme moteur du déséquilibre chimique. Cela permettra d'obtenir des informations inédites sur la chimie des atmosphères riches en métaux, avec le potentiel de jeter un nouvel éclairage sur les trajectoires chimiques et évolutives des exoplanètes de faible masse.

Etude des sursauts gamma cosmiques détectes par la mission SVOM

Les sursauts gamma cosmiques (GRBs) sont des bref (0.1-100 s) éclairs de photons gamma qui apparaissent de façon imprévisible sur toute la voûte céleste. Bien que découverts à la fin des années 1960, ils sont restés mystérieux jusqu'à la fin des années 1990 à cause de leur nature furtive. Ce n'est que grâce aux observations du satellite BepppSAX à la fin des années 1990 et surtout à celles du satellite Swift à partir des années 2000, que le mystère de la nature de ces sources à pu être percé.
En fait il s'agit d'émissions liées d'une part aux phases finales d'une étoile très massive (30-50 fois la masse su Soleil) pour les sursaut longs (>2 s) et de l'autre à la coalescence de deux objets compacts (typiquement deux étoiles à neutrons) pour les sursauts courts (< 2s). Dans tous les cas il y a création d'un jet de matière relativiste qui est à l'origine de l'émission gamma et dans les autres bandes d'énergie. Si ce puissant jet est pointé vers la terre on peut observer les sursauts gamma jusqu'à des distances très élevées (z~9.1) ce qui correspond à un age très jeune de notre Univers (~500 Myr).
SVOM est une mission satellitaire franco-chinoise dédiée à l'etude des sursauts gamma, qui a été lancée avec succès le 22 juin 2024 et dans laquelle le CEA/Irfu/DAp est fortement impliqué. Le sujet de thèse se propose d'exploiter les données multi-longueur d'onde de la charge utile de SVOM et des télescopes partenaires pour mieux étudier la nature des sursauts gamma et en particulier d'utiliser les données du telescope à rayons X MXT, pour mieux contraindre la nature de l'objet compact qui est la source des jets relativistes, qui sont à l'origine des émissions observées.

Calcul quantique avec des spins nucléaires

Les spins nucléaires dans les solides font partie des systèmes quantiques ayant les temps de cohérence les plus longs, jusqu'à des minutes, voire des heures, et sont donc des candidats attrayants pour les qubits ; cependant, le contrôle et la lecture des spins nucléaires individuels sont très difficiles. Dans notre laboratoire, nous avons mis au point une nouvelle méthode pour y parvenir. Les qubits de spin nucléaire sont interfacés par un ancilla de spin électronique, auquel ils sont couplés par l'interaction hyperfine. Le spin électronique est ensuite mesuré par comptage de photons à micro-ondes à des températures de l'ordre du millikelvin [1,2]. La lecture d'un seul cliché de spin nucléaire est effectuée par le biais du spin électronique [3], et le contrôle cohérent est obtenu par l'utilisation de transitions Raman micro-ondes [4]. Les spins électroniques sont des ions Er3+ dans un cristal CaWO4, et les spins nucléaires sont des atomes 183W dans la matrice, qui ont un spin 1/2.

[1] E. Albertinale et al., Nature 600, 434 (2021)
[2] Z. Wang et al., Nature 619, 276 (2023)
[3] J. Travesedo et al., arxiv (2024)
[4] J. O'Sullivan et al., arxiv (2024)

Élucider le mécanisme de la fixation enzymatique du carbone

Le groupe Synchrotron de l'Institut de Biologie Structurale de Grenoble développe actuellement une méthode innovante appelée TR-FOX (Time-Resolved Functional Oscillation Crystallography). Cette technique vise à élucider, d’une part, la dynamique globale des macromolécules biologiques en fonctionnement, et d’autre part, les détails de leur mécanisme catalytique. Elle repose sur l’utilisation d’un injecteur capable de déposer sur l’échantillon cristallin, durant l'enregistrement des données de diffraction, une gouttelette de quelques nanolitres contenant les substrat et cofacteur de la réaction étudiée. Cela déclenche ainsi une réaction enzymatique au sein du cristal. Cette approche peut être couplée à la spectroscopie d'absorption UV-Visible pour caractériser plus précisément la cinétique de la réaction. L'objectif est d'obtenir une série de structures représentant différents états du cycle catalytique, permettant ainsi la réalisation d’un film moléculaire du fonctionnement de l’enzyme. Cette thèse poursuit un double objectif : (i) Améliorer et valider la méthode TR-FOX, (ii) Élucider le mécanisme catalytique de deux enzymes impliquées dans la fixation du carbone soit par capture soit par conversion du CO2.

Top