Modélisation multi-échelle du maclage dans l’étain
Le maclage est un mécanisme de déformation displacif, caractérisé par une déformation continue de la matière. Bien que largement étudié pour d’autres matériaux industriels comme les alliages de titane, ce mécanisme de plasticité reste peu connu et modélisé de manière incomplète pour des structures cristallographiques complexes. Pourtant, du fait du nombre réduit de symétries de ces structures, le glissement de dislocations s’avère insuffisant pour accommoder la déformation selon certaines directions de chargement, nécessitant l’activation du maclage. C'est le cas pour l'étain, qui possède une structure tétragonale. En particulier, le maclage contribue fortement à la réponse mécanique de l'étain aux forts taux de déformations et aux faibles températures. Dans les régimes intermédiaires de température et de taux de déformation, une compétition entre plasticité par dislocations et par maclage peut s’installer, rendant cruciale la description du couplage entre ces deux phénomènes. En proposer une meilleure description permettra d’apporter un nouvel éclairage sur les données expérimentales disponibles au CEA DAM. L'objectif de la thèse est de dérouler une démarche multiéchelle, de la dynamique moléculaire jusqu'à l'échelle du milieu continu, validée sur l'expérience, pour aboutir à un modèle permettant la description du comportement de l'étain sur une large gamme de températures et de taux de déformation.
L’étude des relations microstructure-propriétés est un domaine considérable de la métallurgie et plus généralement de l’ingénierie des matériaux. C’est par exemple leur microstructure martensitique, due à un changement de phase dans le fer, qui est responsable de la dureté des aciers trempés. Ici, nous abordons une métallurgie de l’extrême, en soumettant des échantillons métalliques à des pressions dans le domaine des 100 GPa (=1 millions d’atmosphères), ce qui permet de synthétiser des phases cristallines nouvelles et présentant potentiellement des propriétés intéressantes (dureté, magnétisme, etc.).
Nos systèmes d’étude seront l’étain, puis l’indium et le cobalt, qui présentent tous trois un polymorphisme riche sous haute pression et température. Nous chercherons à élucider le rôle des défauts comme les macles et de la plasticité sur le mécanisme et la cinétique de ces transitions. Ceci sera fait en comparant les observations expérimentales aux prédictions de microstructures par simulation mésoscopique. Les outils de génération de haute pression/température utilisés seront notamment la cellule à enclumes de diamants chauffée par laser, et les outils de caractérisation l’imagerie X in situ par diffraction et la tomographie, ainsi que la microscopie électronique. Les sources de rayons X utilisées seront des sources synchrotron ainsi que le laser X à électrons libres européen.
Développement de spectres Raman théoriques avec application aux minéraux de la surface de Mars
À mesure que nous repoussons les frontières de l’exploration spatiale avec de nouvelles missions vers les planètes voisines, il devient essentiel d’améliorer nos outils d’investigation. Les rovers martiens ont révélé une minéralogie de surface sans équivalent sur Terre, façonnée par une ancienne hydrosphère suivie d’un long épisode de conditions froides et arides. Il a été montré que se sont formés des perchlorates ou des phases vitreuses mixtes silicates-sels — des minéraux difficiles à synthétiser et à stabiliser sur Terre, mais qui demeurent étonnamment stables sur Mars. Les données récentes de spectrométrie Raman confirment leur présence et ouvrent la voie à des recherches approfondies. Comprendre ces minéraux pourrait offrir de nouvelles perspectives sur la chimie martienne et l’évolution planétaire.
Nous cherchons ici à calculer les spectres Raman théoriques des perchlorates et d’autres minéraux martiens à l’aide de la théorie de la perturbation de la fonctionnelle de la densité (DFPT), telle qu’elle est implémentée dans le logiciel ABINIT. L’objectif est d’obtenir non seulement la position et l’intensité des pics, mais aussi et surtout leur largeur. Ces données sont nécessaires pour distinguer correctement des spectres similaires et pour estimer, par intégration, l’intensité réelle des pics, directement comparable aux valeurs expérimentales mesurées sur le terrain. Cela permet d’identifier les pics représentatifs utilisables pour la reconnaissance des minéraux et d’analyser les modes de déplacement associés aux vibrations. Les résultats de nos simulations seront comparés et interprétés à la lumière des mesures effectuées par les rovers actuellement présents à la surface de Mars.
Pour cela, nous devons implémenter plusieurs dérivées d’ordre trois et quatre de l’énergie. Cette implémentation prendra la forme d’une série de termes DFPT, où les perturbations pourront être des déplacements atomiques ou des champs électriques. Nous utiliserons une combinaison du théorème du (2n+1) et de différences finies. Le tout sera réalisé dans le cadre de l’approche "Projector Augmented-Wave" (PAW) en DFT. L’ensemble du développement sera intégré dans le logiciel ABINIT et mis à la disposition de toute la communauté. ABINIT (www.abinit.org) est un projet collaboratif international à grande visibilité, dédié aux simulations ab initio basées sur la DFT et la DFPT. Les spectres calculés seront mis à disposition de la communauté via la base de données WURM.
Le candidat retenu sera co-encadré entre les groupes de l’IPGP (Paris) et du CEA (Bruyères-le-Châtel, au sud de Paris). L’IPGP est un institut de recherche en géosciences de renommée mondiale, fondé en 1921, associé au CNRS, composante de l’Université Paris Cité, et employant plus de 500 personnes. Le groupe dirigé par Razvan Caracas est très actif dans la minéralogie computationnelle, l’étude de la matière dans des conditions extrêmes et la planétologie. Le groupe de simulation quantique de la matière du CEA Bruyères-le-Châtel, coordonné par Marc Torrent, est l’un des principaux groupe de développement du logiciel ABINIT, et particulièrement actif dans la théorie de la fonctionnelle de la densité, l’approche PAW et le calcul haute performance.