Etude gyrocinétique des bifurcations du transport turbulent dans les plasmas de tokamaks : rôle des interactions plasma-neutres

La turbulence et le transport associé dégradent le confinement des plasmas de tokamaks, diminuant les performances attendues en terme de gain énergétique. Expérimentalement, plusieurs régimes de confinement amélioré sont observés, notamment ceux où le transport turbulent est fortement réduit à la périphérie du plasma. Ces barrières de transport externes conduisent à de forts gradients de densité et/ou de température qui maximisent le contenu énergétique du plasma confiné. Ces bifurcations spontanées résultent de l'auto-organisation de la turbulence soumise au forçage de différentes sources, de particules et de chaleur. Leur mécanisme est mal compris, du fait notamment de la complexité topologique de cette région externe et de la richesse des probables processus en jeu. Ces régimes représentent une chance majeure pour atteindre les meilleures performances dans les plasmas d'ITER. Il est donc crucial de gagner en compréhension pour pouvoir prédire leurs seuils de transition et si possible les contrôler.
La thèse proposée s'inscrit dans ce cadre. Elle repose sur la modélisation numérique à l'état de l'art des plasmas de fusion, la description gyrocinétique à cinq dimensions dans l'espace des phases. Les développements récents permettent de traiter séparément les transports de matière et de chaleur dans cette région périphérique. Reste à implémenter une source de particules neutres qui, par ionisation, constituera le forçage en densité du plasma. On sait d'ores et déjà, grâce notamment à des modèles réduits, que cette source dynamique joue un rôle crucial dans les processus d'auto-organisation. L'objectif du travail de thèse est de coupler un modèle fluide de neutres aux électrons et ions décrits cinétiquement, et d'étudier leur impact sur le transport turbulent et son auto-organisation grâce à des simulations HPC (high performance computing) avec le code GYSELA.

Modélisation et optimisation ALARA d’opérations de maintenance de centrales de fusion par des techniques d’Intelligence Artificielle et de Réalité Virtuelle

Dans l’objectif du développement de futurs réacteurs de fusion, une difficulté identifiée concerne les opérations de maintenance de ces installations nucléaires, dont une partie devra être réalisée par des opérateurs humains. Les interventions en environnement radioactif se font suivant des règles de sécurité intégrant notamment le niveau de dose reçue, grandeur qui caractérise le risque auquel s’expose l’opérateur (dose dépendant du débit de dose ambiant et du temps de l’intervention).
Dans un contexte d'optimisation de cette dose conforme avec le principe ALARA et les contraintes de sûreté afférentes à ces installations, la simulation préalable des opérations en Réalité Virtuelle est un atout en termes d’optimisation de conception et d’entraînement des travailleurs. Le calcul de la dose pendant ces simulations serait un apport important permettant de discriminer différentes options. Les méthodes de simulation actuellement utilisées pour le calcul de débit de dose sont pour certaines imprécises et pour d’autres très coûteuses en temps de simulation.
L’objectif de ce travail est de proposer une nouvelle méthode d’estimation dynamique en temps réduit (voire temps réel ou proche) du débit de dose en fonction des déplacements à la fois des sources d’activation d’une installation de fusion, de l’opérateur de maintenance d’un écran protégeant ce dernier, représentatifs des conditions réelles d’intervention. Cette méthode s’appuiera sur des techniques d’Intelligence Artificielle couplées à des méthodes de Neutronique et devra être intégrable dans un outil de Réalité Virtuelle basé sur des plateformes existantes telles que Unity3D.

Conditionnement d'un tokamak en tungstène pendant des décharges plasma de longue durée : de WEST à ITER

Les recherches menées pour développer la fusion thermonucléaire contrôlée comme nouvelle source d’énergie utilisent des dispositifs appelés tokamaks, dans lesquels la matière est portée à haute température (plasma) et est confinée par des champs magnétiques. L’interaction du plasma avec les parois de la chambre à vide d'un tokamak libère des impuretés dont la présence peut affecter ses performances. Différentes méthodes de conditionnement sont alors utilisées pour contrôler l’état de surface de l’enceinte à vide, et donc les flux d’impuretés. Celles-ci utilisent principalement des plasmas basses températures (décharges luminescentes ou radiofréquences) en hydrogène ou en hélium, mais aussi la déposition de couches minces de bore, en raison de sa capacité à piéger par affinité chimique des impuretés telles que l’oxygène. Avec l’avènement des composants face au plasma métalliques et l’allongement de la durée des plasmas dans les tokamaks supraconducteurs, comme ITER et WEST, exploité à l’Institut de Recherche sur la Fusion par confinement Magnétique (CEA-IRFM, Cadarache, France), de nouvelles techniques de conditionnement des parois pour maintenir un état de surface et des performances optimales tout au long de la décharge plasma font leur apparition. L’objectif de cette thèse est de caractériser et d’évaluer sur WEST la pertinence pour ITER de plusieurs méthodes d’injections de bore, a priori et en temps réel. Le travail consistera d’une part à participer à des expériences sur WEST et à analyser des données expérimentales (localisation et durée de vie des dépôts de bore, effet sur les performances des plasmas). Afin de comprendre le transport du bore, le candidat travaillera aussi avec des modèles numériques de plasma de bord (SOLEDGE, EIRENE, DIS). Ce travail, combinant expériences et simulations, devra consolider la compréhension de la physique du conditionnement en environnement métallique et contribuer à prévoir les conséquences pour ITER et les futurs dispositifs de fusion.

Méthodes d'Apprentissage Automatique pour la Détection d'Anomalies dans les Données Expérimentales de Plasma de Fusion - Application aux Données de WEST

Les plasmas de fusion dans les Tokamaks ont une dynamique non-linéaire complexe. Dans le tokamak WEST, de la même famille que le projet ITER, une grande quantité de données expérimentales hétérogènes sur la fusion est collectée. Assurer l'intégrité et la qualité de ces données en temps réel est indispensable pour le fonctionnement stable et sûr du Tokamak. Une surveillance et une validation continues sont essentielles, car toute perturbation ou anomalie peut affecter significativement notre capacité à assurer la stabilité du plasma, à contrôler ses performances voire sa durée de vie. La détection de séquences ou d'événements inhabituels dans les données collectées peut fournir des informations précieuses et aider à identifier des comportements potentiellement anormaux dans les opérations sur le plasma.
Cette thèse vise à étudier et à développer un système de détection d'anomalies pour le tokamak WEST -- en préfiguration de ce qui pourrait être installé sur ITER -- en intégrant des algorithmes d'apprentissage automatique, des méthodologies statistiques et des techniques de traitement du signal pour valider divers signaux diagnostics dans les opérations Tokamak, notamment la densité, l'interférométrie, la puissance rayonnée et les mesures magnétiques.
Les résultats attendus sont :
– Le développement d'algorithmes d'apprentissage automatique capables de détecter des anomalies dans des séries temporelles sélectionnées à partir des données du Tokamak WEST.
– La mise au point d'un système autonome opérationnel pour assurer la qualité des données dans les machines de fusion de type Tokamak, intégré à la plateforme IA de WEST.
– La constitution d'une base de données exhaustive.
– La validation d'un algorithme automatique d'assurance qualité des données spécifiques aux plasmas de fusion.

Turbulence dans le plasma de bord des tokamaks en régime de fort couplage réactif avec les neutres

La stratégie de gestion des flux de chaleur extrêmes vers la paroi des réacteurs de fusion magnétique repose sur la dissipation de l’énergie du plasma par interaction avec le gaz neutre présent au bord du plasma principalement du fait de la recombinaison du plasma en contact avec des matériaux solides. La physique en jeu consiste en un équilibre entre le transport du plasma, dominé par la turbulence, et les réactions atomiques et moléculaires. La modélisation de cette phénoménologie extrêmement non linéaire est nécessaire pour la conception et la définition de l'espace opérationnel des futurs dispositifs comme ITER. Elle requiert l'utilisation de codes numériques traitant de manière auto-cohérente les mécanismes associés, ce qui n'a encore jamais été fait. L'IRFM et AMU ont co-développé un tel outil numérique, le code SOLEDGE3X-EIRENE, qui offre la capacité de modéliser le transport turbulent de manière auto-cohérente et la dynamique des particules neutres dans une géométrie 3D réaliste. De premières études ont démontré que la prise en compte de l’interaction plasma-neutres dans les simulations change significativement l’auto-organisation de la turbulence et le transport qui en découle. Elles ont également souligné que ces simulations soulèvent plusieurs défis spécifiques, liés en particulier à l’apparition de nouvelles échelles de temps long dans le système. Ce projet de thèse vise à poursuivre ce travail pour l’étendre aux régimes de fort couplage entre le plasma et les neutres qui constituent les régimes de fonctionnement envisagés dans les futurs réacteurs. Le travail reposera sur des simulations numériques exécutées sur supercalculateurs de classe mondiale. Leurs résultats seront analysés afin de comprendre la phénoménologie sous-jacente et de la comparer aux tendances expérimentales. En fonction du goût et des capacités du candidat retenu, il pourra également inclure un bras numérique (amélioration du code) ou expérimental (expériences dédiées sur le tokamak WEST ou machines partenaires européennes).

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