Estimation du bruit neutronique stochastique à l’aide d’une approche numérique de simulation d’événements rares. Application au suivi de la réactivité de systèmes nucléaires.
Ce sujet de thèse vise à développer une méthode innovante permettant de caractériser la réactivité de systèmes fissiles à partir de l’analyse de leurs fluctuations stochastiques (bruit neutronique à zéro puissance). Dans un milieu fissile sous-critique, les neutrons issus de fissions spontanées peuvent initier des réactions en chaîne plus ou moins courtes et aléatoires, générant un signal fluctuant. Ce bruit porte une information essentielle sur la distance du système étudié à la criticité, paramètre déterminant pour la sûreté des installations nucléaires (prévention de différents accidents de sûreté-criticité) et pour la détection de matières fissiles non déclarées (sécurité et non-prolifération de matières nucléaires).
Les approches théoriques existantes pour déduire la réactivité d'un système à partir du bruit neutronique sont en effet limitées aux situations idéalisées et deviennent inadaptées dans des configurations réalistes, en particulier lorsque le système est fortement sous critique ou lorsqu’il existe des incertitudes fortes sur sa géométrie ou sa composition (cas des coriums de Fukushima Daiichi ou du stockage de combustibles irradiés). Recourir à des simulations Monte Carlo constitue alors une alternative naturelle, mais ces simulations nécessitent la mise en oeuvre de méthodes de réduction de variance qui ne peuvent préserver correctement les fluctuations stochastiques.
La thèse propose d’adresser ce verrou scientifique en adaptant une méthode de réduction de variance relativement récente dite Adaptive Multilevel Splitting (AMS), utilisée pour explorer efficacement des événements rares tout en conservant leurs propriétés statistiques. L’objectif est d’étendre cette méthode au cas du transport neutronique dans des milieux reproducteurs et d’en faire un outil capable de simuler fidèlement les corrélations temporelles caractéristiques du bruit neutronique. Après développement théorique, l’algorithme sera implémenté dans Geant4, puis comparé à des solutions analytiques et validé expérimentalement via des mesures in situ (utilisant des sources de neutron ou auprès de réacteur). À terme, ce travail pourra ouvrir sur des applications directes en surveillance nucléaire, diagnostic de sûreté et physique des détecteurs, mais présente également des perspectives en physique fondamentale et en physique médicale.