Implémentation de la QRPA covariante pour décrire les noyaux atomiques déformés
Toutes choses étant égales par ailleurs, quelles différences peut-on attendre du choix d’une interaction relativiste ou non dans la description QRPA des états excités du noyau atomique ? Afin de répondre à cette question l’étudiant(e) disposera d’une part d’outils numériques permettant de résoudre pour une interaction non-relativiste les équations QRPA de façon matricielle et d’autre part d’un solveur utilisant la méthode des amplitudes finies pour produire des fonctions de réponse QRPA avec des interactions relativistes.
Ces outils numériques sont performants sur super-calculateurs et largement exploités aussi bien pour répondre à des problématiques de données nucléaires et d’astrophysique que pour mener des études de structure nucléaire académiques. L’extension relativiste du solveur QRPA matriciel permettra de transférer toute l’expertise de production des données nucléaires au cas des interactions issues de lagrangiens relativistes. Ainsi, une analyse des mérites respectifs des deux fonctionnelles pourra être menée et exploitée en vue de la mise au point d’interactions effectives de nouvelle génération.
Développement d’une méthode de propagation d’incertitudes de type fonctionnel sur la puissance résiduelle
La caractérisation de l’énergie dégagée par la désintégration des radionucléides présents dans le combustible usé et déchargé des réacteurs est essentielle pour le design, la sûreté et l’analyse du stockage, du transport et des systèmes de dépôt. Peu de mesures de cette puissance résiduelle sont aujourd’hui disponibles. En outre, les valeurs expérimentales disponibles ne permettent pas de couvrir l’étendue des possibilités de combinaisons entre paramètres (taux de combustion au moment du déchargement – enrichissement en 235U – temps de refroidissement – paramètre de design du combustible – conditions opérationnelles – applications spécifiques). L’estimation de la puissance résiduelle est donc principalement basée sur des simulations.
L’évaluation de l’incertitude associée à l’estimation de la puissance résiduelle revêt un aspect important dans l’objectif d’accéder à une prédiction fiable. De nombreux efforts ont été menés afin de bien évaluer les biais et incertitudes venant des données nucléaires telles que les sections efficaces, paramètres importants en entrée des simulations. En revanche, les études concernant les incertitudes de nature épistémique (incertitude de fabrication de certains composants, erreur de lecture ou de réglage de structures mobiles, ….) sont plus rares. Parmi ces dernières, on peut distinguer le traitement de dépendances complexes de paramètres d’entrée de type scalaire, bien pris en compte aujourd'hui, du traitement de dépendances fonctionnelles (s’exprimant sous forme d’une fonction), très peu exploré.
En particulier, l’historique d’exploitation du cœur regroupe sous une dépendance fonctionnelle plusieurs quantités inter-corrélées (puissance de fonctionnement, mouvement des absorbants, évolution du cœur, …), amenées à être modifiées en fonction du temps et impactant la valeur de nombreux observables d’intérêt dont la puissance résiduelle. Les modèles utilisés aujourd’hui dans les outils de simulation utilisés à l’échelle industrielle ne permettent pas d’estimer cet impact et de proposer un niveau d’incertitude validé.
Dans ce travail de thèse, on se propose d’étudier l’impact sur la puissance résiduelle des incertitudes associées aux paramètres d’entrée présentant des dépendances fonctionnelles. On se focalisera tout particulièrement sur l’historique d’irradiation des réacteurs (à eau) et les paramètres corrélés. Une première partie sera dédiée au développement d’un modèle de substitution pour l’estimation de la puissance résiduelle et la quantification des incertitudes des variables aléatoires fonctionnelles. Une deuxième partie sera consacrée au développement d’une méthode d’analyse de sensibilité pour le modèle de substitution développé. Enfin, une troisième partie concernera le développement d’une méthode inverse de quantification des incertitudes des paramètres de modélisation opérationnels.
Le doctorant sera hébergé dans une unité de recherche en physique des réacteurs de l'institut CEA IRESNE situé à Cadarache où il collaborera avec d’autres doctorants et spécialistes du domaine.
Intelligence artificielle pour la mesure de masse de précision d’isotopes exotiques
L'objectif de cette thèse de doctorat est d'améliorer la précision des mesures de masse des isotopes exotiques produits par le Super Spectrometer Separator (S3) à GANIL-SPIRAL2, en utilisant des techniques d'acquisition de pointe qui intégrent l'intelligence artificielle. Les capacités du spectromètre de masse à temps de vol PILGRIM pourront être pleinement exploitées par un développement collaboratif du système d'acquisition FASTER au LPC Caen.
RECHERCHE DE LA DÉSINTÉGRATION NUCLÉAIRE EN DEUX PHOTONS
La désexcitation nucléaire en deux photons, c.à.d. la décroissance par émission de deux rayons gamma, est un mode de désexcitation rare du noyau atomique, au cours duquel un noyau excité émet deux rayons gamma simultanément pour revenir à l’état fondamental. Les noyaux pair-pair ayant un premier état excité 0+ sont des cas favorables pour rechercher la décroissance double gamma puisque l’émission d’un seul rayon gamma est strictement interdite pour les transitions 0+ -> 0+ par conservation du moment angulaire. Cette décroissance présente toujours un très petit rapport d’embranchement (<1E-4) en comparaison avec les autres modes de désexcitation possibles, soit par l’émission d’électrons de conversion interne (ICE) soit la création de paires positron-électron (e+-e-) (IPC). Nous utiliserons donc une nouvelle technique pour rechercher la décroissance double gamma: l’étude de la désexcitation d’un état isomérique 0+ de basse énergie dans les ions nus, c.-à-d. entièrement épluchés de leurs électrons atomiques. L’idée de base de l’expérience est de produire, sélectionner et stocker les noyaux dans leur état isomérique 0+ dans l’anneau de stockage de l’installation GSI en Allemagne. Lorsque le noyau est entouré du cortège électronique l’état 0+ excité est un état isomérique à durée de vie assez courte, de l’ordre de quelques dizaines à quelques centaines de nanosecondes. Toutefois, aux énergies relativistes disponibles à GSI, tous les ions sont entièrement épluchés de leurs électrons atomiques et la désexcitation par ICE n’est donc pas possible. Si l’état d’intérêt est situé en dessous du seuil de création de paires, le processus IPC n’est pas possible non plus. Par conséquent, les noyaux nus sont piégés dans un état isomérique de longue durée de vie, qui ne peut se désintégrer que par émission de deux rayons gamma vers l’état fondamental. La désexcitation de l’isomère serait identifiée par spectroscopie de masse Schottky (SMS) à résolution temporelle. Cette méthode permet de distinguer l’isomère de l’état fondamental par la (très légère) différence de leur temps de révolution dans l’ESR, et d’observer la disparition du pic de l’isomère dans le spectre de masse avec un temps de décroissance caractéristique. Après une première expérience réussie qui a fait preuve de la décroissance double gamma dans l'isotope 72Ge une nouvelle expérience a été accepté par le comité d’expériences de GSI et son réalisation est prévu en 2024.
Etude de la magicité et des forces nucléaires dans le noyau de 68Ni
Nous proposons d’étudier le caractère magique ou superfluide du noyau de 68Ni par réactions d’ajout et de retrait de neutrons (d,p) et (p,d). Celles-ci vont également permettre d’étudier l’interaction spin-orbite dans ce noyau riche en neutron, pièce essentielle à la compréhension des forces nucléaires et des noyaux magiques. Le 68Ni sera produit à l’aide du spectromètre LISE au GANIL et la trajectoire des noyaux, les rayonnements gamma émis, ainsi que les protons et deutons signant le transfert sont tous détectés.
Développement de cibles et de faisceaux radioactifs pour l’installation SPIRAL1-GANIL
Le groupe cibles-sources du GANIL cherche à étendre la gamme de faisceaux d’ions radioactifs ré-accélérés fournis par l’installation SPIRAL1 pour accroitre l’attractivité des installations existantes et futures. Cette thèse propose :
- La production de faisceaux de Fe, Ni, Co en augmentant la température d’opération des ECS (ensemble cible source) actuels.
- La production de faisceaux plus intenses via de nouvelles cibles qu’il sera nécessaire d’étudier, de réaliser et de tester.
Écorces d’étoiles à neutrons à température finie
Nées chaudes de l'explosion de supernovae, les couches extérieures (l’écorce) des étoiles à neutrons (EN) sont initialement constituées d'un milieu composé de diverses espèces nucléaires. Une étude théorique de l’écorce de l’EN à température finie sera effectuée, focalisée sur le traitement des noyaux dans le milieu dense de l’écorce. Ce modèle sera employé pour calculer l’équation d’état et la composition de l’écorce, et utilisé pour prédire des propriétés nécessaires pour la modélisation globale d’EN.
Théorie unifiée de la structure nucléaire et des réactions dans le cadre du système quantique ouvert
Les noyaux faiblement liés ou résonnants jouent un rôle important dans divers processus stellaires de nucléosynthèse. La compréhension globale de ces noyaux nécessite une description correcte du continuum multiparticulaire. Il est proposé d'étudier des réactions complexes d'intérêt astrophysique et des résonances étroites proches du seuil qui jouent un rôle crucial dans la nucléosynthèse d'éléments plus lourds, en utilisant le modèle Gamow Shell dans la représentation des canaux couplés.
Variété de formes dans le noyau du 96Zr étudiée avec les spectrome`tres gamma AGATA et GRIFFIN
Le sujet de la thèse porte sur l'étude expérimentale des propriétés macroscopiques et microscopiques du noyau du 96Zr. Récemment, l’observation d’un état déformé dans ce noyau magique a été explique par les calculs de la structure nucléaire en termes d'une réorganisation des couches nucléaires en fonction de leur remplissage par les protons et les neutrons. Selon ces calculs sophistiquées, le noyau du 96Zr présente une variété de formes ellipsoïdales à une faible énergie d'excitation, et il peut également prendre la forme de poire.
Nous étudierons ces formes variées en utilisant la puissante technique d'excitation coulombienne, qui est la méthode la plus directe pour déterminer la forme des noyaux dans leurs états excités. L'expérience sera réalisée à l'aide d'AGATA, un spectromètre gamma de nouvelle génération, constitué d'un grand nombre de cristaux de germanium finement segmentés, qui permet d'identifier chaque point d'interaction d'un rayon gamma a l’intérieur du détecteur puis, à l'aide du concept innovant du «gamma-ray tracking », permet de reconstruire les énergies de tous les rayons gamma émis et leurs angles d'émission avec une précision sans précédent. Une expérience complémentaire sera réalisée à TRIUMF (Vancouver, Canada) en utilisant le spectromètre le plus avancé au monde dédié aux mesures de désintégration bêta, appelé GRIFFIN. Ce projet fait partie d'un vaste programme expérimental de notre groupe sur l'évolution des formes de noyaux et leur coexistence.
Mesures de haute précision de reculs nucléaires à l’échelle de 100 eV pour les détecteurs cryogéniques
La méthode CRAB vise à calibrer de manière absolue les détecteurs cryogéniques utilisés dans les expériences de recherche de matière noire et de diffusion cohérente de neutrinos. Ces expériences ont en commun le fait que le signal recherché est un recul nucléaire de très basse énergie (quelque 100 eV) nécessitant des détecteurs avec une résolution de quelques eV et un seuil de O(10eV). Or jusqu’à présent il était très difficile de générer des reculs nucléaires d’énergie connue pour caractériser la réponse de ces détecteurs. L’idée principale de la méthode CRAB, détaillée ici [1,2], est d’induire une réaction de capture avec des neutrons thermiques (énergie de 25 meV) sur les noyaux constituant le détecteur cryogénique. Le noyau composé résultant a une énergie d’excitation bien connue, l’énergie de séparation d’un neutron, comprise entre 5 et 8 MeV selon les isotopes. Dans le cas où il se désexcite en émettant qu’un seul photon gamma, le noyau va reculer avec une énergie qui est aussi parfaitement connue car donnée par la cinématique à deux corps. Un pic de calibration, dans la gamme recherchée de quelques 100 eV, apparaît alors dans le spectre en énergie du détecteur cryogénique. Une première mesure réalisée, en 2022, avec un détecteur cryogénique en CaWO4 de l’expérience NUCLEUS (expérience de diffusion cohérente de neutrinos portée par TU-Munich et dans laquelle le CEA est fortement impliquée) a permis de valider la méthode [3].
Le travail de cette thèse s’inscrit dans la deuxième phase de ce projet qui consiste à réaliser des mesures de haute précision avec un faisceau de neutrons thermiques du réacteur TRIGA-Mark-II à Vienne (TU-Wien, Autriche). Deux approches complémentaires seront menées de front pour atteindre une haute précision : 1/ la configuration du détecteur cryogénique sera optimisée pour une très bonne résolution en énergie, 2/ de larges cristaux de BaF2 et de BGO seront placés autour du cryostat pour une détection en coïncidence du recul nucléaire dans le détecteur cryogénique et du rayon gamma qui a induit ce recul. Cette méthode de coïncidence réduira significativement le bruit de fond et permettra d’étendre la méthode CRAB à un plus large domaine d’énergie et aux matériaux constitutifs de la plupart des détecteurs cryogéniques. Nous attendons de ces mesures une caractérisation unique de la réponse des détecteurs cryogéniques, dans un domaine d’intérêt pour la recherche de la matière noire légère et la diffusion cohérente de neutrinos. La haute précision permettra également l’ouverture d’une fenêtre de sensibilité à des effets fins couplant de la physique nucléaire (temps de désexcitation du noyau) et de la physique du solide (temps de recul du noyau dans la matière, création de défauts cristallins lors du recul d’un noyau) [4].
L’étudiant(e) sera fortement impliqué dans tous les aspects de l’expérience : la simulation, l’installation sur site, l’analyse et l’interprétation des résultats obtenus.