La thématique des données nucléaires est centrale pour les applications de l’énergie nucléaire, constituant le pont entre les propriétés « microscopiques » des noyaux et les valeurs clés « macroscopiques » utiles aux calculs de physique des réacteurs et du cycle. Le Laboratoire d’études de Physique de l’institut IRESNE du CEA Cadarache est engagé dans l’évaluation de ces données nucléaires dans le cadre d’un programme développé au sein du groupe JEFF (animé par l’Agence de l’Energie Nucléaire) et d’un Coordinated Research Project de l’AIEA. Le développement récent d’une nouvelle méthodologie d’évaluation des rendements de fission (taux de production des produits de fission après l’émission des neutrons prompts) induite par neutrons thermiques a permis d’améliorer les précisions des évaluations proposées pour la bibliothèque JEFF-4.0 en fournissant leur matrice de covariances. Pour étendre les évaluations de rendements de fission induites par neutrons thermiques au spectre des neutrons rapides, il est nécessaire de développer un couplage des outils d’évaluation actuels avec des modèles de rendements de fission avant émission des neutrons prompts. Ce couplage est indispensable pour extrapoler les études déjà réalisées sur la fission thermique de l’235U et du 239Pu aux noyaux moins connus expérimentalement (241Pu, 241Am, 245Cm) ou étudier la dépendance de ces rendements avec l’énergie cinétique des neutrons incidents. Une des composantes essentielles manquantes est la description de la distribution en charge nucléaire (Z) en fonction de la masse des fragments de fission et de l’énergie du neutron incident. Ces distributions sont caractérisées par un paramètre clé : la polarisation de charge. Cette polarisation traduit un excès (respectivement défaut) de proton dans le pic des fragments légers (respectivement lourds) par rapport à la densité de charges moyenne du noyau fissionnant. Si cette quantité a été mesurée pour la réaction 235U(nth,f), elle est lacunaire pour d’autres énergies de neutrons ou d’autres systèmes fissionnants. Les perspectives de ce sujet portent autant sur l’impact de ces nouvelles évaluations sur les grandeurs-clés pour les applications électronucléaires qu’à la validation des mécanismes de fission décrit par les modèles microscopiques de fission.